lundi 14 octobre 2019

Le football, une arme à mieux utiliser pour combattre la pauvreté en Haïti



Durant l’année 2019, on assiste à une crise politique de plus en plus aiguë. Littéralement, nous avons  connu des moments de blocage extraordinaire. Mais à côté de tout cela, la sélection senior masculine de football nous a permis de connaître des moments d’effrois aussi extraordinaires. Cela a pu être possible par leur performance spectaculaire au Gold UP  En terminant premier de son groupe avec 9 points sur 9 par des victoires les unes plus intéressantes que les autres (2-1 face au Bermudes, 2-0 face Nicaragua, 2-1 face au Costa Rica). La sélection a franchi les quarts de finals avec manière, 3-2 contre Canada. Elle a eu un bon match face au Mexique 0-1 en demi final.
Juste avant la GOLD CUP sa participation dans la première phase de la ligue des Nations a été tout aussi remarquable. Et maintenant pour ce mois de septembre 2019, les grenadiers poursuivent cette competition de Ligue des Nations (Ligue A), dans le groupe D avec le Costa Rica et le Curaçao. Ils viennent de trébucher pour leur premier duel en double confrontation sur une équipe de Curaçao en pleine progression (7 septembre, 0-1 à l'aller puis 10 septembre 1-1 au retour) et ont eu un match nul face au Costa Rica. A signaler, tout comme cette sélection, nos différentes autres sélections de football sont en progression, comme la U17 masculine (qualifiée pour la phase finale de coupe du monde Brésil octobre 2019), la U20 féminine (sa participation remarquable à la coupe du monde de 2018), La U15 féminine (Brillante en match amical en d'aout 2019, 2 victoires en 2 matches, 5-0 face au République Dominicaine, 5-0 face au Trinidad), la U14 (Remporte le groupe C du Challenge CFU U14 2019, avec 4 victoires en 4 matches, 18-0 face au Bonnaire, 20-0 face a la sélection Turcs and  Caicos et 18-0 face, puis 1-0 face au Porto Rico). De part ce dynamisme, le football peut-il vraiment servir de modèle pour restructurer des secteurs vitaux nationaux haïtiens? Peut-il aussi aider significativement à l'élargissement de la classe moyenne et riche en Haïti?
D'après la petite histoire, le football comme étant sous-secteur important,  a commencé à s’organiser en Angleterre en 1863 et s’est étendu rapidement au reste du monde. Il a été l’une des premières manifestations de la mondialisation avec la coupe du monde, qui remonte à 1930. Aujourd’hui, la Fédération Internationale de Football Association (FIFA), l’instance dirigeante du football mondial a davantage de membres nationaux que l’ONU. Il a été depuis, aussi une discipline qui lutte fortement contre la discrimination raciale (le racisme). D’après une enquête Big Count de la FIFA, publiée en 2006, on dénombre environ 113,000 footballeurs professionnels dans le monde, dont 60,000 travaillent au sein de l’Union des associations européennes de football (UEFA), l’instance dirigeante européenne (Kunz, 2007). Selon les calculs de l’UEFA, en 2011, les revenus du football européen ont atteint 16 milliards d’euros, dont 6,9 milliards pour les salaires.
Le football européen offre l’image du succès au sens qu’il a les plus grands clubs, les meilleures équipes nationales (seuls le Brésil et l’Argentine arrivent au même rang que des pays européens comme l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, la France ou les Pays-Bas), les plus grandes ligues nationales, et les compétitions les plus importantes. La mobilité du travail a largement contribué à maintenir la domination européenne. Jadis, les joueurs changeaient souvent d’équipe pendant la même saison au gré d’éventuelles offres plus alléchantes. Mais, les clubs ont institué un système de transfert obligeant tout joueur professionnel à être enregistré auprès d’un club. L’enregistrement était la propriété du club, et le footballeur ne pouvait pas jouer ailleurs tant qu’il n’était pas transféré. Initialement, le club détenait l’enregistrement à perpétuité, sauf s’il le vendait; le joueur était ainsi lié au club. Le principal objectif de ce système était de maintenir les salaires des joueurs à un niveau bas.
Dans les années 60, les joueurs ont commencé à réclamer davantage de droits, notamment la liberté de changer de club à la fin de leurs contrats. La migration internationale des joueurs est devenue un élément important du football à partir des années 50. À cette époque, l’Argentin Alfredo Di Stefano et le Hongrois Ferenc Puskás étaient les piliers de la grande équipe du Real Madrid, et dans les années 60, les clubs espagnols et italiens ont fait la chasse aux meilleurs joueurs d’Europe et d’Amérique du Sud. Mais jusqu’aux années 1990, la mobilité était surtout internationale. Avec le développement du câble et du satellite, le nombre de match retransmis à la télévision a augmenté dans les années 1980, entraînant une forte hausse de la demande de contenus sportifs et créant un public international pour les matchs de ligue. L’accroissement de la compétition a aussi encouragé les clubs à aller chercher davantage de talents en dehors des frontières. Alors que seulement 9 footballeurs étrangers jouaient dans la Premier League anglaise en 1992, ils étaient 290 en 2013, soit les deux tiers du total des effectifs. Même si les chiffres sont moins astronomiques dans les autres ligues européennes, le pourcentage de joueurs étrangers a atteint environ 50 % en Allemagne, environs 41% en France et environ 40 % en Espagne. D'une manière plus spécifique (Maguire, Joseph, Elliott et Richard, 2008) dans 30 ligues étudiées la présence des joueurs latino-américains parmi les expatriés, est assez contrastée, étant particulièrement forte en Portugal (79,6%), en Italie (51%), en Espagne (47.8%), très faibles l'Ecosse (2,5%) et l'Irlande (1.5%). Parmi ces joueurs on retrouve évidemment des joueurs haïtiens.
Quelques Joueurs haïtiens en catégorie masculine senior évoluant en Europe à l’heure actuelle

Espagne

 Jean Sebastien Lauture (2eme division, Cultural Leonesa); Mikael Gabriel (3eme division, Tropezon); Jim Fednel (3eme division, Sarinena); Tcharly Saint Fleur (3eme division, Sarinena); Mikael Cantave (4eme division, CD Lealtad)

France

   Fredler Christophe (Ligue 1, Racing Club Strasbourg); Jean-Ricner Bellegarde (Ligue 1, Racing Club Strasbourg); Jean-Kevin Duverne (Ligue 1, Stade Brestois); Frantzdy Pierrot(Ligue 2, Guingamp); Hervé Bazile (Ligue 2, Le havre); Brian Chevreuil (Ligue 2, Châteauroux); Bryan alceus (Ligue 2, Paris FC); Stéphane Lambese (Ligue 2, Orléans); Max Hilaire (Ligue 2, Chambly); Carlens Arcus (Ligue 2, Auxerre); Leverton Pierre (National 1, FC Metz); Bryan Labaissière (National 2, Guingamp); Listner kelnel Pierre-Louis (National 3, Jura Sud); Jean Verron (National 3, Ivry); Shelove Archelus (National 3, Ajaccio II); Romain Genevois (National 3, Châteauroux II); Gary Ambroise (National 3, Arras)

Pays-bas

    Richelor Sprangers ( 1ère division, Telstar); Hannes Delcroix (1ère division, RKC Waalwijk)

Armenie

       Alex Junior Christian (1ère division, Ararat-Armenie); Jonel Désiré(1ère division, FC Lori); Djimy Bend Alex (1ère division, FC Lori)

Belgique

       Duckens Nazon ( Saint-Truidense, 1ere division)

Azerbaidjan

       Sony Nordé( 1ère Division, FC Zira);

Source: Soccerway.com et Haïti-Tempo

 
Donc le progrès de notre sélection n'est inéluctablement lié au éventuel progrès considérable de nos championnats de football nationaux. Certes, L'équipe nationale durant la Gold Up a été compose de 50% de locaux et 50% de l'étranger. Toutefois il y a des efforts consentis durant ces 10 dernières années,  mais les championnats locaux restent beaucoup à faire pour arriver
à un niveau professionnellement acceptable.
Il est évident que les championnats nationaux souffrent des problèmes infrastructures monstrueuses. De plus, on ne trouve pas des entrepreneurs qui s’investissent à fond dans des équipes. Vous retrouverez, des clubs en D1, D2, D3 dans des situations économiques excesivemenent précaires, que nous n'allons pas détailler. Ce qui implique que nos joueurs locaux généralement  ne sont pas à leur meilleur niveau en termes de potentialité.
Après  la participation de l'équipe nationale masculine senior dans la coupe du monde Allemagne 1974, avec la génération de footballeur comme Emmanuel Sanon, Philippe Vorbe, Henry Francillon, pour ne citer que cela. Sans discussion le football devient de plus en plus le sport Roi en Haïti. Depuis la nuit des temps, malgré les investissements ont été rachitiques dans ce sport, avec un championnat de première division qui essaie de lever sa tête, mais toujours en brancale, le peuple haïtien reste attaché et rêve de revoir une sélection haïtienne leader dans les caraïbes et dans l'hémisphère américain. Rappelons-nous aussi, par la combativité de la sélection de 2007 avec des joueurs comme Alexandre Boucicaut, Jean Jacques Pierre et les autres, nous avons remporté la Caribbean Cup. Bien d'autre bon match, comme le nul contre l'Italie en amical en 2017. Donc l'Espoir est là!
Après cette rencontre versus l'Italie, la sélection nationale entame une progression remarquable. La ligue des nations de 2018-2019 et le Gold Cup sont des preuves éminentes.
Au niveau de la compétition ligue des nations les rencontres  jouent au principe (aller retour), cela implique donc des infrastructures adéquats standard pour chaque équipe. Dès la première phase de la compétition nous avons eu des menaces de fort fait à cause nous n'avons pas réellement un stade de standard malgré des petites rénovations ont été réalisées avant le match de Curaçao.
En recevant l'équipe cubaine au stade Sylvio Cator le 24 mars dernier ( league des nations), le nombre d'haïtien voulant suivre le match en direct au stade qui se sont obligés de rester dehors, ont été presque le double de ceux qui ont trouvé de place. La capacité d'accueil n'est seulement 10 500 personnes, pourtant plus 20 000 supporters étaient disposés à supporter les grenadiers. Faute d'infrastructure, leur soif reste insatisfaite. Dans les émissions sportives à la télé et à la radio, sur les réseaux sociaux on demande de meilleures infrastructures sportives. Les investissements réalisés jadis sont très limités. Haïti a donc besoin des investissements beaucoup plus sérieux sur le plan sportif. 
Il est temps de comprendre que le football, tout comme d'autres sports, a besoin le support des autres secteurs, comme la santé, le logement, le transport et la communication....Si nous arrivons à résoudre le problème de service sanitaire que nous avons, si nous arrivons à résoudre le problème de transport, le problème d'hébergement, tout cela aura un impact très positif sur le progrès de nos différents sports, notamment le football.
Une des images au sens d’humoristique, que les internautes haïtiens font un montage exprimant la surprise de la sélection haïtienne durant la Gold Up 2019, est celle du capitaine de la sélection canadienne juste après la 3eme but haïtien.  Il a marqué un but, mais refusé par le corps arbitral, car il était hors jeux. En mettant les mains sur sa tête et ouvrant grandement les yeux pour exprimer sa désolation; les internautes font de cette image que le joueur a appris que cette Haïti qui arrive à élever la tête devant son équipe n'a qu'un seul stade! La leçon dans tout ca, c'est que si nous avions des investissements valables qui se focalisaient dans ce sport là, et indirectement d’autres investissements dans de domaines complémentaires,  les résultats seraient encore plus importants.
Il est donc temps que nous comprenions que le football reste l'un des marchés les plus ouverts dans le monde et que nous prenions les dispositions qui s'imposent pour en profiter. Beaucoup d'enfants et de jeunes haïtiens ont le talent de jouer au foot. Plusieurs adultes d'aujourd'hui qui pataugent dans la misère sont des footballeurs ratés car dans le quartier, à l'école, ils ne trouvaient pas assez d’encadrements.
Tout comme certaines stars musicales s'investissent dans leur pays et participent grandement dans le développement économique de leur pays/dans leur continent. À titre exemple le rappeur afro-américain Akon. Il y a des footballeurs qui font de même. C’est le cas de Lionel Messi de l'Argentine à Rosario sa ville natale. Donald Guerrier vient de le faire dans le sud. Milien Pascale à leogane. Donc, le développement de ce sous-secteur peut apporter un plus dans notre économie.
Il importe de savoir aujourd'hui, si nous ne produisons pas beaucoup plus de personnes qui puissent devenir riche, nous ne pouvons jamais devenir un pays riche. Il nous faut beaucoup plus de riches et une classe moyenne plus élargie. Le football engendre des millionnaires à travers le monde, nos footballeurs devront avoir aussi ce privilège. Nous devons donc créer les conditions pour que nos joueurs puissent arriver au sommet .
De ce fait, une politique sportive sur le long terme doit être définie et mise en application en Haïti. L’enfant ou le jeune qui veut bien reussir sa vie à partir de ce sport est une evidence.. En guise de décisions à prendre par l'Etat Haïtien pour y arriver, je propose cinq:
1- Exiger aux clubs un espace de formation continue débutant a bas âge. Cet espace sera supporté par l'Etat à travers la MJSAC et la FHF pour son décollage.
2- Travailler à aider les clubs de devenir de véritables institutions qui fonctionnent en plein régime, qui peuvent assurer leur progression après leur décollage et peuvent aussi donner des rapports annuels pertinents.
3- A partir des formations continues, renforcer le professionnalisme du staff de dirigeants des clubs.
4- Mettre en place des incitations à l'investissement dans ce sous-secteur à partir d'un projet ou d'une proposition de loi.
5- Standardiser la promotion du football  à l'échelle nationale et mondiale.







      JP Wesner Emmanuel Louis-Jeune,
      Economiste, Consultant en développement communautaire
      Président du CAD/CADHAI








  


                                                            Notes
·        Bastien Drut, Économie du football professionnel, La Découverte, coll. « Repères Économie », 2011 
·        Bastien Drut et Richard Duhautois, 20 questions improbable sur le foot, De Boeck, 2014, 120 pages
·        Jean-François Bourg, Football business, Paris, Olivier Orban, 1986 
·        (en) David Conn, The Football Business. Fair game in the 90's?, Londres, Mainstream, 1997, 308 p. 
·        Cf. MAGUIRE, Joseph ; ELLIOTT, Richard, “Thinking outside the box : exploring a conceptual synthesis for research in the area of athletic labor migration”, Sociology of Sport Journal, vol. 25, n° 4, 2008, pp. 482-497.
·        Géoéconomie no 54, Football, puissance, influence, Paris, Choiseul, 2010
·        Pierre Rondeau et Richard Bouigue (issn de la collection), Le foot va-t-il exploser ? : pour une régulation du système économique du football






3 commentaires:

  1. L'équipe Grenadiers FC, entre autre, vient récemment de remporter la Copa América à Taiwan. Une preuve de plus que notre football se fait une santé en ce moment.🙂

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  2. La progression continue.
    Merci pour votre commentaire Laguerre Defay.

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  3. Bon travail Emmanuel ! Merci pour ce que vous faites au sein de la communauté haïtienne.

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